Porte conteneurs: halte au gigantisme !

 

L’inauguration en juin par François Hollande du « Jules Verne » , maxi porte-conteneur de  396 mètres de long, d’une capacité de 16020 EVP (« équivalent vingt pieds »,  unité de mesure pour désigner un conteneur standard)  , présenté comme le plus grand du monde, mais déjà dépassé par les classes EEE de Maersk Line (18 000 EVP) nous donne l’occasion de revenir sur les risques et questions de sécurité liées au gigantisme de ces navires.

Le transport par voie maritime est un des moins chers pour ce qui est du rapport cout par tonne transporté. La tentation est alors grande d’en diminuer encore le cout par l’augmentation du volume embarqué. On assiste au même phénomène dans le transport aérien (A 380) ou par camion (maxi-poids lourds) sans tenir compte de l’aggravation proportionnelle du risque et des dommages en cas d’accident.

Les photos spectaculaires de l’incendie du MSC Flaminia  dérivant pendant plusieurs semaines dans l’atlantique en 2012, les photos non moins spectaculaires du MOL Comfort brisé en deux dans l’Océan indien attestent si besoin est que ce risque existe.

Une première série de questions concerne le navire lui-même dont la taille en fait un monstre des mers. L’exercice de sauvetage du Marco Polo en mars a mis en avant les limites d’une intervention avec des remorqueurs comme l’Abeille Bourbon, avec des conditions météorologiques  pourtant idéales et dans  une  zone possible d’intervention des  remorqueurs.

Qu’en serait-il d’une avarie majeure, en pleine tempête, la prise au vent dépassant les 10 000 mètres carrés ? La dérive est rapide et une gîte de 10° est considérée comme maximum, avant de voir les conteneurs passer par-dessus bord.

La deuxième série de questions concerne les conteneurs et les matières qu’ils transportent. Il semble que la législation internationale soit suffisamment laxiste pour autoriser des surpoids de manière à échapper aux droits de douanes, que les déclarations de matières dangereuses, explosives, chimiques ou radioactives  soient elles aussi quasi inexistantes, ce qui a permis en 2012 de découvrir grâce à Objectif Transition et Robin des Bois que le MSC Flaminia transportait 40 tonnes de PCB . Face à un incendie majeur sur ce type de porte conteneur, aucun système de lutte traditionnel  n’est opérationnel.

Nous pouvons également citer le « Atlantic Cartier », incendié dans le port de Hambourg avec à son bord une cargaison hautement radioactive, révélé uniquement grâce aux Verts de Hambourg .

Compte-tenu de leur tirant d’eau de 16 mètres ces géants des mers seront accueillis en France au port du Havre, et en Europe du nord à Southampton, Hambourg, Rotterdam, ils transiteront donc par le rail d’Ouessant et la Manche ; en Méditerranée, le transit est prévu entre Tanger, Malte et le canal de Suez, donc aucune de nos côtes n’est à l’abri d’un accident majeur de maxi porte conteneurs.

Objectif Transition demande que très rapidement les législations internationales, européennes et françaises soient révisées pour améliorer les mesures de sécurité autour des questions complexes posées par ces géants des mers. Objectif Transition demande à minima une application stricte de la directive européenne Erika III sur les ports refuges, de manière à éviter la répétition du scénario du MSC Flaminia que l’on a sciemment maintenu dans les eaux internationales plusieurs semaines avant d’enfin se décider à l’accueillir en Allemagne.

La tentation est grande pour les différents pouvoirs politiques de cantonner l’accident de transport maritime à une affaire privée entre l’armateur et l’assureur mais le devoir des Etats est de contrôler les cargaisons, l’état des navires et d’imposer des mesures de sécurité pour éviter toute catastrophe humaine et écologique.

N’attendons pas un accident majeur pour réagir !

 

Photo: madle-fotowelt.de